Conseils de lecture

18,00
Conseillé par (Libraire)
12 janvier 2023

Le Chemin de Fer nous avait déjà habitué à ses wagonnets de pépites, et le Prix Mémorable vient ici en couronner une des plus étincelantes, longtemps cachée au fond d’une mine tenue secrète que nos éditeurs ravivent sans relâche. Grâce à eux, nous avions redécouvert la stridence poétique et l’audace formelle de Béatrix Beck, d’Albertine Sarrazin, de Violette Leduc, de la mystérieuse Laure ou encore d’Annie Saumont. Nous voici ici étourdis par la farouche liberté qui se dégage de la balade hallucinée de « Renata ». Alors « n’importe quoi », ou encore l’air de rien, cette immense œuvre, salutaire et moderne, initialement parue en 1967, se recompose pour notre époque. Et rien n’en entravera l’indispensable déploiement, pas même la ponctuation que Catherine Guérard jugeait déjà trop racornie pour en conserver les poussiéreuses contraintes. Le souffle ainsi délié de notre candide et arrogante héroïne, sa course, aussi folle et bruyante que celle d’un torrent furieux, racontent la blessure et la radicalité d’une authentique résistante, rétive à toute aliénation… « et alors ma liberté à quoi elle m’aurait servi si c’était pour que je m’ennuie ».


Susan Howe

Ypsilon

22,00
Conseillé par (Libraire)
1 novembre 2022

"Cela faisait des années que je cherchais les mots pour remercier Emily Dickinson de l’inspiration que m’a procurée son audace poétique…" Susan Howe

Ouvrir "Mon Emily Dickinson", c’est aller extraire de la gangue d’une réputation devenue aliénante une des expériences poétiques les plus modernes qui soient. C’est entrer au cœur du langage minimaliste et syncopé d’une femme radicalement traversée par un souffle vital qui se mesure à une angoisse fondamentale. C’est parcourir, en l’effeuillant méthodiquement, l’herbier dissonant de la "nonne d’Amherst" et réinsuffler à chacune de ses captures botaniques la sève des fleurs et des feuilles qu’elle se plaisait à documenter. C’est convoquer autour de cette "reine recluse" l’environnement intellectuel et familial (l’héritage puritain et la rectitude protestante des pères fondateurs des Etats-Unis) et le contexte historique (la violence et l’ambiguïté de la guerre de Sécession) dont elle est un avide et sauvage réceptacle. C’est corriger une erreur persistante commise par ses pairs – tous masculins – qui, si tant est qu’ils eussent pu les décrypter, se savaient confusément menacés par l’ampleur et l’audace créatives de celle qui, depuis, est devenue l’une des figues les plus rayonnantes de la poésie anglo-saxonne. "L’oreille consciente" d’Emily Dickinson est ici rendue à sa puissance de contamination et c’est bien en poète que Susan Howe, abreuvée et reconnaissante, ramasse son enquête érudite à la "circonférence" d’une œuvre qui se déploie en révélations aussi lumineuses qu’insaisissables.

"Ma Vie passa – Fusil Chargé – " Emily Dickinson


Ana Maria TORRES

La Grange Batelière

15,00
Conseillé par (Libraire)
10 octobre 2022

Terra Fria est un récit puissant et ramassé qui puise dans la mémoire, au prisme d’une double confession intime et poétique. Derrière ce que l'on devine comme un retour d’expérience sur l’immigration portugaise en France, liée à la pauvreté, à la lente disparition du travail, au dénuement et à l’abandon forcé de certains modes de vie, s'y révèle par capillarités la profonde tristesse d'un exil rendu à une forme de banalité. L'écriture charrie les sentiments les plus contradictoires, autorise les règlements de compte, s’attarde sur la question du choix mais capte aussi tous les émerveillements qui jaillissent de cette terre rude et silencieuse. Terra Fria devient alors aussi une évocation solaire, presque aveuglante, de l’enfance, cet Eden, dont l'incandescence force l'éloignement, qui nous ouvre à la contemplation et donc à la résistance face à la dureté.


Anton Beraber

L'Atteinte

16,00
Conseillé par (Libraire)
21 juin 2022

Une rencontre improbable que seule la littérature permet, entre qui pourrait être écrivain — témoin universel et absolu — et qui représenterait l’archétype de nos vices et nos dérives les plus secrètes — un misanthrope misogyne, décati, grossier, répugnant, un vagabond, un marginal —
Un verbe fort, un humour grinçant, qui racontent l’inavouable enfoui en tout individu. A ranger au rayon des romans cultes, à côté de "La Grande vie" de Jean-Pierre Martinet ou des "Saisons" de Maurice Pons.


17,00
Conseillé par (Libraire)
26 mai 2022

"Soi-même éparpillé et mélangé à tellement de fragments de nuages, de cailloux, de feu, de noir, de bruit et de silence." En citant ainsi Claude Simon ("La Route des Flandres", Editions de Minuit, 1960), Sophie Daull nous délivre, incidemment ou pas, l'exacte description de l'émotion toute humaine qui nous étreint à la lecture de ce roman dense et implacable. Derrière chaque évocation, grave ou cocasse, se dissimule un paysage familier et un accès partagé à la mémoire universelle des joies et des tragédies qui jalonnent une existence terrestre. Maîtrisé et si beau.